Ivi la nattée

Jadis sur la terre d’Afrique  – terre brûlée, terre en transes, terre de toutes les magies – vivait une jeune fille appelée Ivi. Sa peau était noire et douce comme le cœur de l’ébène que l’artisan polit avec amour. Ses cheveux étaient si beaux, si longs, si épais que sa mère passa plus d’un an à les lui natter. Aussi sa coiffure était-elle parfaite, comme son caractère, aimable et généreux. Ivi la Nattée, comme on la surnommait, était désirée de tous les garçons du village, prêts, juraient-ils, à ne prendre qu’une seule femme, pourvu que ce soit Ivi. Mais celle-ci n’en aimait encore aucun.

Le jour de son quinzième anniversaire, le Grand Griot s’invita dans la modeste case, suivi par un escargot. Lire la suite >

Pas de statut pour le Père Noël ?

Le Père Noël s’arrête. Il ôte sa hotte. Stoppe les préparatifs. Ca alors ! La relit trois fois, la circulaire du patron.

Mauvaise nouvelle. Confirmée par un mail du syndicat.

Eh, ça mérite méditation, ça réveille la réflexion.

De quoi protester, ah, ça, oui, il a de quoi, le Père Noël. Mon statut, mon statut !

Plus intermittent que moi, tu meurs ! qu’il grommelle dans sa barbe. Un jour par an de plein emploi ! Le reste du temps : chômage technique.

Et voilà qu’on veut lui supprimer ses indemnités !

On n’aura jamais que de la misère avec ce patron-là, dit la mère Noël.

Il va les nourrir comment, ses rennes ? hein ? les garder en forme, les bichonner toute l’année, et le loyer de l’étable ? le graissage du traîneau, hein ? de sa poche peut-être ? en farfouillant dans sa robe ?

Comment il va entretenir sa bedaine, mettre son costume au pressing ? C’est de sa faute s’il ne travaille qu’une nuit par an ? C’est à lui que ça nuit, évidemment. Et, pour la retraite, le nombre d’annuités? in-fi-ni ! Plus t’es vieux, plus t’es vendeur. Lire la suite >

Quand tu descendras du ciel

La maîtresse, elle a une surprise pour nous, qu’elle a dit. Méfiance. Les « surprises » et les « projets », en général, c’est inquiétant.

Sa surprise, c’est des catalogues, plein de catalogues. On doit d’abord les reconnaître, puis les nommer, c’est la « leçon de langage ». Donc il a fallu attendre que Sullivan ait réussi à cracher ca-ta-lo-gueu pour qu’elle nous lâche un peu.

Après, elle nous a fait dire que les Ca-ta-lo-gueu viennent de Courrefar ; ça, Sullivan, il a trouvé tout de suite, et même Wilson, qui dit jamais un mot.

C’était pas fini.

Des jouets, les enfants, vous allez choisir les jouets que vous voulez ! Vos jouets pour NNNNNNN………………..

Noël, on a tous répondu en choeur, pour lui faire plaisir.

Alors, les jouets ? Lire la suite >

B A child again

Qu’est-ce qu’on est venu foutre à l’île Maurice ? Ah, oui ! prendre l’avion, nous sommes à l’île Maurice pour prendre l’avion. Une idée de Carla.

Moi, je lui dis à chaque fois : ici, j’ai l’impression d’être tombé dans un catalogue d’agence de voyage. Ce sable blanc qui oblige à porter des lunettes de soleil foncées, ce lagon toujours turquoise, immobile, à peine quelques bateaux de pêche de temps à autre, avec des voiles de couleur, comme pour renforcer le cliché, moi, ça m’ennuie. Et cette façon qu’ils ont, les Mauriciens, de rouler à gauche, c’est dangereux, n’est-ce pas ? Carla trouve cela exotique.

Carla, elle, adore cette île. Elle dit qu’elle a assez vécu dans les brouillards et les maisons  grises autrefois. A peine arrivés, nous voici sur le port de Mahébourg où il n’y a rien, bien sûr. Rien. Nous allons au bout du môle : un kiosque avec un pêcheur qui pêche, comme on pouvait s’y attendre. Rien. Carla s’extasie en regardant le lion couché au soleil couchant. C’est un rocher qui, paraît-il, évoque un lion, ses pattes arrière trempant dans le lagon. Carla, ça lui rappelle son enfance dans le Cotentin. En plus éclairé, dit-elle, tellement plus.

Soudain, dans  la décoration lumineuse du kiosque, une ampoule électrique explose. Lire la suite >